Eau-forte, pointe sèche, aquatinte et brunissoir, Kn 32 II
À l’origine, Käthe Kollwitz voulait conclure son cycle »Une Révolte des tisserands« avec la gravure symboliste, »Ton sang s’écoule de nombreuses plaies, Ô Peuple«, qui révèle l’influence stylistique de Max Klinger. La citation au présent montre qu’avec son cycle des Tisserands, Käthe Kollwitz voulait attirer l’attention sur les problèmes de son temps.
La figure du justicier appuyé sur son épée illustre ce même aspect. Il s’agit d’une allégorie de la révolution censée annoncer la libération du peuple. Deux femmes ligotées et un cadavre étendu se tiennent devant le justicier, qui effleure délicatement du doigt le flanc blessé de l’homme mort.
Les références au »Christ mort au tombeau« de Hans Holbein (1497-1536) et aux larrons crucifiés en même temps que Jesus doivent être interprétées dans le contexte des convictions laïques de Kollwitz. La vie et la mort du Christ deviennent ainsi synonymes de la souffrance de tous les êtres humains ou de grandes parties de la population.
Le justicier est une sorte de personnification des critiques émises par les jeunes intellectuels sociaux-démocrates, en particulier Konrad Schmidt, le frère de Käthe Kollwitz, à l’encontre du drame social de Hauptmann. Dans un article sur »Les Tisserands« dans la Freie Volksbühne en 1898, il reproche à la pièce son fatalisme et qu’elle n’offre, contrairement au roman de Zola, »Germinal«, aucune perspective de vengeance.
Käthe Kollwitz, »Ton sang s’écoule de nombreuses plaies, Ô Peuple«, 1896, mine de plomb sur papier vergé blanc, NT 122